Résistance et Déportation dans la vallée du Rabodeau
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Le maquis que l’Histoire avait oublié

Contre l’oubli
Article mis en ligne le 6 mars 2007
dernière modification le 8 janvier 2010

par Gerard

29 avril 2061. La Fête de la Déportation [1]

 Jacqueline, dépêche-toi, Papa va s’impatienter !

 On va où, là ?

 A la Fête de la Déportation.

 De la quoi ? la Déportation, c’est quoi comme fête, ça ?

 A vrai dire, c’est pas tout à fait une fête je crois, mais il faut aller déposer une gerbe de fleurs sur un monument.

 Des fleurs ? pour qui ? pour quoi ?

 C’est ton père, qui avait un grand-père qui avait lui-même un grand-père qui avait été à la déportation...

 Tu rigoles Maman, mais ça remonte au moins aux années 1940, ça, tu te rends compte que ça va faire bientôt six générations, ça. Et il faut aller où pour cela ?

 A Paris, ma chérie.

 Quoi, à Paris ? se taper 300 km pour ça, t’as rien de plus près ? T’aurais pas quelqu’un de la guerre de Sécession dans tes ancêtres, au moins on pourrait faire un beau voyage !

 Mais ma chérie, on ne t’a donc rien appris au Lycée ?

 Si, on a un Prof qui nous a dit qu’à cette époque, il y avait des types, tous habillés en brun, qui mettaient des gens dans des trains pour les envoyer en villégiature dans des pays de l’Est, parce qu’en France, il n’y avait plus de place à cause des congés payés presque permanents à cause des 15 heures de travail par semaine. Et puis aussi que tous ces gens n’ont plus voulu revenir tellement ça leur a plu là-bas, alors comme on ne les a plus revus, le bruit a couru qu’on les avait tués

Ce qui est totalement faux, puisque notre Prof, qui est l’arrière-arrière petit-fils du célèbre Professeur Faurisson, nous a appris que toute cette histoire avait été inventée par quelques cinglés qui étaient revenus de là-bas, mais qui étaient d’abord allés aux Fêtes de la Bière en Bavière, et en étaient revenus complètement givrés et avaient raconté toutes ces fariboles en France à leur retour

Alors, pourquoi veux-tu que j’aille perdre mon temps aprés de tels bobards à une fête de la Déportation, et puis le Professeur Faurisson nous a aussi raconté, ce qui prouva qu’il en sait des choses, que tous ces gens qui se faisaient appeler « déportés » s’amusaient tellement bien là-bas, que tous les soirs, ils allumaient des feux de joie en chantant "Lili Marlène" en dansant comme des fous en hurlant "Pitchipoï, Pitchipoï". C’est le nom qu’ils avaient donné à cette région, "Pitchipoï".
C’est rigolo comme nom, ça, "Pitchipoï’, hein Maman ?

Bon, eh bien dis à Papa que je n’ai pas de temps à perdre avec des cornichonneries pareilles.
Tu te rends compte... le grand-père du grand-père de mon père à "Pitchipoï", et il faut aller porter des fleurs à 300 km d’ici.
Fête de la Déportation... sans moi... Salut !

Serge Smulevic

(Le 29 avril 1945, le camp de concentration de Dachau où je me trouvais, fut libéré par les Américains)


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